Gentile Bellini
La procession sur la place Saint Marc,(Processione della Vera Croce
Oriane : Oh je reconnais la place Saint Marc mais il manque la tour de l’horloge et le pavement de marbre gris et blanc. Quel est l’intérêt qu’a eu Gentile Bellini de faire ce type de peinture d’un lieu en en modifiant des éléments aussi majeurs? Y’a t’il un rapport avec la procession qui s’y déroule?
Angel : Tu n’es pas sérieuse j’espère? Ou alors tu m’inquiètes! Regarde la date de ce tableau! Tout simplement, les éléments dont tu parles n’existaient pas encore! La tour de l’horloge a été construite peu après et le pavement de marbre réalisé par Tirali en 1723. Ce tableau, le premier qui montre ce lieu en grand angle a déjà le mérite de nous informer, comme une photo d’archive de l’aspect des lieux à la fin du XVème siècle. On y voit aussi les mosaïques vénitio-byzantines des portails de la basilique dont seule celle de gauche a survécu. On reconnaît le bas du campanile et la partie du Palazzo Ducale qui jouxte la basilique avec sa porte de la charte dont le marbre était à cette époque doré. Si tu observes bien, tu vois aussi que les procuraties ne sont pas les mêmes et qu’à la place actuelle de la tour de l’horloge il y avait un édifice gothique.
Oriane : Ha oui, c’est intéressant! Il manque aussi les tables des terrasses des cafés et même les pigeons! Mais je suppose que le but de l’artiste n’était pas seulement de montrer aux générations futures l’aspect de la piazza San Marco à cette époque! Il représente aussi et surtout une procession.
Angel : Oui, c’est la procession qui avait lieu tous les 25 avril, jour de la Saint Marc, où était exhibée un coffre contenant la relique. Cette scène ferait référence précisément à la procession du 25 avril 1444, où un marchand venu de Brescia, qui après avoir invoqué l’aide de Saint Marc pour son fils gravement blessé, a vu sa demande exaucée. Le protagoniste, agenouillé derrière le baldaquin, passe cependant presque inaperçu au milieu d’une scène que la composition du tableau incite à parcourir en totalité en passant le regard de groupes en groupes ainsi que sur les bâtiments.
Oriane : c’est vrai que je n’avais pas remarqué cet homme agenouillé, bien qu’il soit au premier plan et dans une zone centrale. C’est donc un détail de l’histoire de cette procession annuelle, comme les détails bien représentés des différentes confréries dont les habits et accessoires sont précisément figurés. Ainsi, on reconnaît les frères de la Scuola Grande di San Giovanni Evangelista qui habillés de blancs et portant des bougies, transportent le coffre de la relique.
Angel : Waouuuu! Finalement je suis surpris de tes connaissances…
Oriane : J’ai lu tout ça, et retenu un peu le discours de l’audioguide… Même si je reste choquée par l’oubli de la tour de l’horloge sur ce tableau!
Angel : … Je renonce… Avançons…
Gentile Bellini
Miracle de la relique de la croix au pont de San Lorenzo
(Miracolo della reliquia della Croce al ponte di San Lorenzo), Gentile Bellini 1500
Angel : Voici un autre tableau majeur de Bellini daté de 1500 représentant un épisode de l’histoire de Venise survenu selon une légende entre 1370 et 1382. il s’agit du repêchage de la relique de la croix tombée accidentellement dans le canal lors d’une procession autour de l’église San Lorenzo. La relique se serait mise à flotter mais ne se serait laissé récupérer que par le prieur de la confrérie, parmis de nombreux sauveteurs intéressés, ce qui fût considéré comme un miracle. Bellini a représenté ce prieur sous les traits d’Andrea Vendramin, guardian grande de la scuola de San Giovanni avant de devenir doges.
Oriane : A gauche on voit des femmes avec des chapelets et à droite cinq hommes agenouillés. Qui sont ils?
Angel : Tu en poses des questions… A gauche, Caterina Cornaro, native de Venise et future reine de Chypre et ses dames. A droite, des membres influents de l’école.
Oriane : Mais que vient faire cette femme de la fin du 15ème dans cette scène datée d’un siècle plus tôt?
Angel : elle a tout simplement marqué l’histoire de la Venise de cette époque du fait de sa beauté et donc des fantasmes qu’elle a pu susciter à travers des récits de complots et intrigues politiques agrémentées de tueries et histoires amoureuses. Bellini, comme d’autres peintres de cette époque a posé sa fascination pour cette femme sur plusieurs de ses tableaux. Mais l’intérêt de ce panneau réside aussi dans les décors de cette scène urbaine, qui montre les cheminées rondes typiquement vénitiennes et les peintures murales.
Oriane : Ha oui… Nous n’avons donc pas tout à fait le monopole de la description et la collection des cheminées vénitiennes!
Vittore Carpaccio
Miracle de la relique de la croix au pont du Rialto, Vittore Carpaccio 1480
Oriane : Non, regarde! ici aussi la collection de cheminées vénitiennes est impressionnante! J’en compte pas moins de 37! Et puis, que de couleurs, que de détails… Ce tableau est magnifique! Mais que raconte t’il au juste?
Angel : Ce chef d’oeuvre réalisé à l’huile sur toile est le plus connu de Vittore Carpaccio. Il est aussi appelé “La guérison du fou” (Il miracolo dell’ossesso).
Oriane : Mais pourquoi deux titres? Et deux titres qui ne parlent pas tout à fait de la même chose…
Angel : Bien sur que si: le second titre précise le premier. Le miracle en question est celui de la guérison d’un patriarche, qualifié de fou, grâce à la relique de la croix. Mais cette scène, représentée à gauche dans la loggia, passe inaperçue, tout comme la procession qui se déroule sur le pont. Carpaccio a répondu à la commande et n’a pas oublié de peindre les patriciens vénitiens, spectateurs de la scène. Mais il s’est surtout fait plaisir à représenter sa ville de façon extrêmement minutieuse. D’ailleurs, le premier détail que tu as remarqué devant cette oeuvre n’est pas le miracle, mais le chapelet de cheminées vénitiennes!
Oriane : Et puis la représentation du pont du Rialto à cette époque en bois et qui s’ouvrait pour laisser passer les gros bateaux; et puis celle du grand canal et de sa vie, des palais qui le borde. Les gondoles n’avaient pas tout à fait leur forme actuelle: la proue ne comportait pas les six barres symbolisant les six sestieri depuis le XVIIème siècle.
Angel : C’est vrai, et puisqu’on entre dans une analyse très fine, on peut remarquer aussi qu’elles ne transportent pas de touristes absorbés à réaliser un selfie pour immortaliser le moment plus qu’à le savourer…
Oriane : Plus sérieusement, cette toile riche en détails, nous informe sur l’aspect du grand canal à la fin du XVème siècle, sur les vêtements portés à l’époque et sur la vie de ce quartier qui comme aujourd’hui grouillait de monde, plus que du miracle qu’il est censé raconter.
Tintoret ou Jacobo Tintoretto ou de son vrai nom : Jacobo Robusti
L’enlèvement du corps de Saint Marc (Trafugamento del corpo di san Marco), Jacopo Robusti dit Jacopo Tintoretto 1562-1566
Angel : Allons découvrir le fameux tableau du Tintoret “L’enlèvement du corps de Saint Marc” qui représente l’un des mythes fondateurs de Venise. Viens, c’est par ici.
Oriane : ce tableau est un chef d’œuvre du Tintoret et donc on devrait trouver dedans la solution de la clavicule de Salomon, c’est ça ou je n’ai pas tout compris ?
Angel : Le voici! Regarde, le corps de Saint Marc est à Alexandrie sur le point d’être brûlé sur le bûcher, mais un puissant orage fait fuir les gardes.
Oriane : Heu… J’ai l’impression d’avoir déjà vécu cette scène, prononcé les mêmes mots, entendu la même réponse de ta part, vécu la même excitation!
Angel : C’est normal! C’était pendant notre recherche de notre émeraude! Tu sais, notre fable d’Oriane et Angel à Venise sur les pas de Corto Maltese…
Oriane : Ha oui! Et…
Angel : Donc tu disais…
Oriane : c’est bizarre les bâtiments sont ceux de Venise et non d’Alexandrie.
Angel : Tu as raison, le Tintoret semble mélanger les lieux. Regarde dans le tableau, trois chrétiens coptes en profitent pour dérober la dépouille du Saint.
Oriane : D’après ce que j’ai lu les reliques de Saint Marc arriveront à Venise 800 ans après, en 827 dissimulés dans de la viande de porc pour passer les douanes musulmanes, comme le montrent les mosaïques en or de la basilique Saint Marc.
Angel : Une expédition franco de port, en quelque sorte. Par contre regarde l’orage du haut sur le tableau, il crée le désordre du bas. En fait on dirait que ce qui est en bas est comme ce qui est en haut, et ce qui est en haut est comme ce qui est en bas.
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Saint Marc et Venise
En 826, la ville de Venise, qui a alors comme patron saint Théodore Tiron, se cherche un nouveau puissant protecteur céleste pouvant rivaliser avec Rome et son saint patron l'apôtre Pierre. Deux marchands vénitiens, Bon da Malamocco (it) et Rustico da Torcello34, sont payés par Giustiniano Participazio, onzième doge de Venise, pour aller voler ses reliques dans la petite chapelle de Bucoles en Égypte où elles se trouvent depuis sa mort35. Une mosaïque de la basilique Saint-Marc rappelle la tradition rocambolesque de la translatio de saint Marc, issue d'un genre littéraire caractéristique de la littérature hagiographique, le récit de translation : les navigateurs vénitiens échangent dans le tombeau le corps de l'évangéliste avec celui de saint Claude36 et cachent aux autorités portuaires musulmanes les reliques dans un panier au milieu de couches de feuilles de chou et de viande de porc (viande taboue pour les musulmans). Le , les deux marchands remettent les reliques au doge, qui les installe dans une chapelle ducale attenante au palais des Doges, la future basilique37.
Giustiniano Participazio, le doge, fait alors construire la basilique Saint-Marc afin d'abriter ces reliques. Marc devient ainsi le saint patron de la ville avec son lion comme symbole. Lors de la reconstruction de la basilique commencée en 1063, les reliques sont perdues mais selon la tradition sont miraculeusement retrouvées en 1094 après trois jours de jeûne, un des piliers du bras droit du transept s'effritant et révélant la présence d'un bras du saint lui-même qui indique la présence des reliques. Les reliques sont alors placées dans un sarcophage dans la crypte de la nouvelle basilique puis sous le maître-autel au xixe siècle38.
Le vol de ces reliques par les Vénitiens empoisonne durant des siècles les relations entre l'Église latine et l'Église copte orthodoxe. En juin 1968, le pape Paul VI décide finalement de restituer la ou les reliques aux coptes. Selon les autorités religieuses vénitiennes, il s'agit d'une « relique de contact », c'est-à-dire d'une étoffe qui a été mise en contact avec la tombe du saint, donnée au Vatican par le patriarche de Venise Giovanni Urbani, et non de toutes les reliques de la basilique Saint-Marc qui sont restées sur place39. Elle repose aujourd'hui sous l'autel de la cathédrale Saint-Marc du Caire40.
Chaque année, à Venise, le 25 avril, saint Marc est honoré par des cérémonies réunissant la population et les autorités civiles et religieuses.
Célébration
Marc est vénéré comme saint et célébré par la plupart des Églises chrétiennes le 25 avril et par l'Église orthodoxe de Grèce le 27 septembre.
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